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  • Posté le 16 octobre 2020 / 304 visites

Le vacataire n’a pas qu’à se taire !

Des décisions multiples (entre autres : Conseil d’État CÉ , 4e et 1re chambres réunies, 2 décembre 2019, n° 412941, dans les tables du recueil Lebon) apportent un éclairage sur une catégorie de personnel peu exposée à la lumière : le ou la (s’agissant souvent de femmes) vacataire.

Précaire parmi les précaires, la catégorie vacataire est souvent définie, à défaut de texte réglementaire « positif », par la jurisprudence.

COLLABORATEUR TEMPORAIRE

En principe, elle ou il est engagé pour exécuter un acte déterminé comme collaborateur temporaire de l’administration, à moindre coût. Il s’agit d’un « agent recruté pour exécuter une tâche précise qui ne répond pas à un besoin durable et continu dans le temps, et qui ne se trouve pas dans une position de subordination vis-à-vis de son employeur » (circulaire éducation nationale n° 2004-099 sur le recrutement et rémunération des médecins de Prévention non titulaires).
Cette position qualifiée de « prestation de service ponctuelle » (circulaire n° 1262 du 26 novembre 2007 relative aux agents non titulaires de l’État), conduit à exclure les vacataires des dispositions « protectrices » du décret n° 86-83 du 17 janvier 1986 relatif aux dispositions générales applicables aux agents contractuels de l’État.
Les vacataires, rétribués sur un taux horaire ou à la tache sont ainsi privés du supplément familial de traitement (art. 10 du décret n° 85-1148 du 24 octobre 1985), de l’indemnité de résidence, de droit à la formation, de congé de maladie, de maternité… Ces agents ne peuvent pas prétendre non plus à des congés payés.

FRAIS TRANSPORTS

Néanmoins une décision récente de la plus haute juridiction (CÉ, 3e et 8e
chambres réunies, n° 420567, 7 février 2020, conclusions Laurent Cytermann disponibles en ligne) vient de leur reconnaître un droit nouveau : les frais de transport (décret n° 2010-676 du 21 juin 2010 instituant une prise en charge partielle du prix des titres d’abonnement).
C’est l’occasion de se reposer, à nouveau frais, la question de la distinction entre le vacataire et le contractuel (voir dossier : Fonction publique, Zig zag dans le droit, février 2012, p. 21-23).

REQUALIFICATION

Comme le rappelle le conseil d’État (cité, n° 4129412), le vacataire : « doit être regardé comme ayant été engagé pour exécuter un acte déterminé lorsqu’il a été recruté pour répondre ponctuellement à un besoin de l’administration.
La circonstance que cet agent a été recruté plusieurs fois pour exécuter des actes déterminés n’a pas pour effet, à elle seule, de lui conférer la qualité d’agent contractuel. En revanche, lorsque l’exécution d’actes déterminés multiples répond à un besoin permanent de l’administration, l’agent doit être regardé comme ayant la qualité d’agent non titulaire de l’administration ». Au cas particulier, l’agent « a été régulièrement employé […] en vue de remplacer les gardiens titulaires de résidences accueillant des personnes âgées lorsque ces derniers prenaient leur repos hebdomadaire, leurs congés légaux ou des jours de récupération » répondant de fait, à « un besoin permanent de l’administration ».
Cela ouvre à des droits liés à la transformation et la requalification du vacataire en contractuel avec les droits afférents, comme la réintégration de ce vacataire, non reconduit, professeur de musique dans une école municipale de 1996 à 2016, avec
obligation de lui accorder un contrat à durée indéterminée (CAA de DOUAI, 3e chambre, 24 octobre 2019, n° 18DA00876, dans le sens de CÉ, 3e et 8e chambres réunies, 29 mars 2017, 393150, tables).

Faux vacataire mais vrai contractuel, l’agent laissé par ce contrat irrégulier peut demander à son employeur de réparer le préjudice financier imputable à la différence de rémunération entre vacataire et contractuel, sur le plan matériel (CAA de BORDEAUX, 11 octobre 2018, n° 16BX01843) et moral y compris au regard de préjudice d’anxiété (condamnation à TA Amiens, 21 décembre 2017, n°s 500706 et 1503527, 1 000 euros).

PRÉJUDICE

Parfois les condamnations sont beaucoup plus lourdes. Ainsi un agent avait été employé par l’École nationale des travaux publics de l’État en qualité de chargée de cours d’espagnol vacataire ou de professeur d’espagnol non-titulaire de janvier 1980 à décembre 2012. Le refus de reconnaître le caractère à durée indéterminée de son engagement lui a causé des troubles dans ses conditions d’existence et un préjudice moral fixés à 50 000 euros (CAA de LYON, n° 17LY00182, 22 octobre 2018).

Il faut donc être vigilant. Un vacataire qui dure et endure dispose de droits ! C’est bon à savoir et à faire reconnaître…

Extrait de Le Fonction publique n°294, le journal de l’UFSE-CGT de septembre 2020